Monday, October 26, 2009

J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans

Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances,
Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
Cache moins de secrets que mon triste cerveau.

Baudelaire, les Fleurs du Mal

Pour mes anniversaires et les photos de classe, Violaine portait toujours une robe à bretelle en velours millerais jaune.
Au primaire Olivia avait un ensemble sous-pull jaune avec une tête de Milou sur le col – jupe en velours noir que je lui enviais beaucoup.
Je me souviens encore de la quasi-totalité de la garde robe de Fanny au collège. Et pour le côté moins vestimentaire, je peux encore réciter toutes les poésies que j’ai apprise à cette époque.
La première fois où j’ai parlé à Clémence elle portait un haut en tie-and-dye orange à manches détachables avec des plaques militaires au cou.
Il y a un jour précis où j’ai porté mon jean gap avec un pull turquoise et mes b.o. Tiffany’s, et la lumière était rouge.
Je peux reconnaître une paire de chaussures YSL d’il y a 2 ans sans problème, et y associer le nom de l’actrice qui l’a porté sur le tapis rouge.


Je ne me souviens pas de tout ça volontairement, et même plutôt l’inverse. Parce qu’en fait, avoir autant de mémoire ça me pourrit la vie. Ça veut dire que je ne peux rien entendre ou lire sans savoir que je vais le retenir ensuite, et que j’y penserai ensuite dès que la situation présentera le moindre petit lien avec. Et que ça va enclencher derrière toute une réflexion qui va s’éloigner de plus en plus du sujet jusqu’à finir par être complètement déprimante. Ceci étant un cas caractéristique d’overthinking, qui a tendance à s’aggraver encore plus quand je fais des rêves désagréables (comme cette nuit, par exemple).

Mon genre de mémoire a tendance à être d’autant plus déprimant que, pour paraphraser Thémistocle (et oui, les références culturels de ce blog s’améliorent, trop la classe :P) : « Je retiens même ce que je ne veux pas retenir et je ne peux pas oublier ce que je veux oublier ». Ce qui se traduit la plupart du temps par un oubli beaucoup plus rapide de tout ce qui a trait aux matières étudiées en cours que d’une quelconque autre information. Et ça me rend plutôt tristounette de me souvenir du nom de la fille dernière-née de Nicole Richie mais de devoir chercher pendant un certain temps la valeur de la constante de Planck.

Paradoxalement, je détesterais ne plus me souvenir aussi bien de tout. Il y a un côté rassurant à avoir des souvenirs aussi précis et aussi imagés dont je peinerais beaucoup à me passer. D’ailleurs j’ai beaucoup de mal à accepter que les gens autour de moi n’aient pas une mémoire aussi méthodique, mais que ce n’est pas parce qu’ils ne se souviennent pas de certaines choses qu’elles sont insignifiantes pour eux.

Apparemment, mon genre de mémoire se rapproche de l’hypermnésie, qui est due au fait que la mémoire à court terme de la personne passe très vite en mémoire à long terme, d'où le fait de retenir beaucoup de détails insignifiants par rapport à la masse d'informations retenues. Mémoire qui poussée à l’extrême peut entraîner des névroses caractérisées par de l’agressivité, un manque d’assurance en société, des angoisses incontrôlables et de la paranoïa, entre autre symptômes sympathiques. Disons que j’en suis encore trèèèès loin, donc…

Saturday, October 10, 2009